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L'INTERNATIONALE : PRÉSENTATION HISTORIQUE

 

 

 

Catégorie : Histoire

 

 

 

 

 

 

 

 

   L’Internationale ! Ce terme même n’est-il pas source de confusion ? S’agit-il du chant le plus célèbre du mouvement ouvrier, socialiste au-delà des querelles, ou bien de la Première Internationale, la plus mythique, l’AIT (ou Association Internationale des Travailleurs) ? En tout cas, deux symboles du genre humain au-delà des rivalités, une forme d’aspiration à un idéal de perfection, d’un monde meilleur. J’ai choisi de traiter du chant révolutionnaire. N’oublions pas que les paroles et la musique sont produites par deux ouvriers tourneurs - de simples ouvriers -, ce qui en donne encore plus d’émotion. Ils produisirent le chant révolutionnaire le plus célèbre - avec la Marseillaise. Les deux chants symboles des révolutions et de l’aspiration à la Liberté et à un monde meilleur fait de justice et de solidarité ont été  effectivement écrits dans l’esprit français.

 

   L'Internationale, c’est une marche, une marche qui doit enthousiasmer le peuple, les travailleurs du monde entier. N’oublions pas qu’elle fut écrite par un homme reclus, caché, traqué, pourchassé, qui savait que la mort l’attendait s’il était pris, en juin 1871, trois semaines après un autre mythe de la classe ouvrière, la "Semaine sanglante". L’entrée des Versaillais par la porte d’Auteuil et la porte de saint-Cloud, une trahison, et puis par le sud, malgré la présence de Louise Michel à la gare de Clamart et sur le plateau de Châtillon, des milliers de morts, des femmes condamnées emprisonnées à Satory car "pétroleuses", des enfants, cousins ou petits frères de Gavroche (Delacroix et Hugo), des hommes fusillés pour avoir les mains noires (donc couvertes de poudre), des déportés comme Louise Michel, Nathalie Lemel, des exilés comme Jules Vallès. Une guerre civile épouvantable sur un petit territoire, mais si symbolique, Paris, la capitale des révolutions du XIXe siècle. Et là, un homme de la Commune, élu du 2e arrondissement, un de ces battus de l’Histoire, comme le dit Michel Ragon, écrit un appel à l’union, à l’espoir dans un monde meilleur, ce chant entonné encore aujourd’hui : "L’internationale"...

 

   Avant d’aborder les couplets et le refrain de ce chant, je propose que nous en rappelions le contexte. Il y a d'abord la Révolution, l’idéal de perfection, la réalité. Deux Hymnes révolutionnaires d’origine française - je l'ai dit. Deux hymnes révolutionnaires qui sont internationalement connus et ont été traduits dans toutes les langues : "La Marseillaise", hymne national et de liberté, "L’Internationale", traduisant l’identité de la classe ouvrière qui se vivait exclue de la nation. "La Marseillaise", c’est le chant des révolutions du XIXe siècle dans toute l’Europe et au-delà. En France, c’est le chant des barricades de 1830 et de 1848. C’est un chant de la nation, révolutionnaire tant que la réaction menace, à savoir les "Blancs", les royalistes. Pourtant, la rupture au sein du peuple va se situer en 1848 lorsque des républicains tirent pendant les journées de juin contre les habitants des quartiers populaires. Ainsi émerge une "conscience de la classe" ouvrière, ruinée par la révolution industrielle et exploitée par les capitalistes ; si j’utilise ces mots, c’est que nous les retrouverons dans les paroles de ce chant. Les premières références théoriques socialistes ou communistes sont Gracchus Babeuf et son "Manifeste des Egaux", Charles Fourier et son "phalanstère". Il existe de nombreux autres chants d’appel à la solidarité. Au fil des ans, les thèmes sont en maturation : la "lutte des classes", concept établi par François Guizot, repris par Augustin Thierry, voire Adolphe Thiers, l’exploitation de l’homme par l’homme, la course au profit, la bourgeoisie dominante, le capitalisme mondial... Le concept de socialisme émerge avec Owen, Saint-Simon, Fourier, Proudhon... Le socialisme est donc initialement d’inspiration française. Plus tard, deux grandes tendances s’affronteront : les proudhoniens et les marxistes ou marxiens ("Philosophie de la misère et misère de la philosophie", polémique Proudhon/ Marx)... En 1862, à l’occasion de l’Exposition universelle de Londres, à l’initiative de Français comme Tolain et des syndicats britanniques, l’idée d’une Association Internationale des Travailleurs émerge et se concrétise en 1864. Malgré ses divisions, comme sait si bien en produire le mouvement ouvrier, l’AIT apporte son soutien à la Commune de Paris. Marx, après la "Semaine sanglante", écrit "La guerre civile en France".

 

   Il y a ensuite l'auteur, Eugène Pottier. Dans ce contexte d’émergence d’une prise de conscience internationale, apparaît un inconnu, Eugène Pottier, un ouvrier lui aussi. Il écrit, envoie des poèmes à Béranger, un célèbre chansonnier, goguettier de l’époque. Il admire Blanqui, "l’Enfermé", se sent proche du mouvement coopérateur de Fourier et Considérant. Il s’oppose aux guerres de Napoléon III. Certains couplets de l’Internationale feront écho à ces proximités idéologiques. Membre actif de la Commune, élu du 2e arrondissement, il est pourchassé - comme je l’ai dit. Il faut se rappeler de la traque que subirent les "Fédérés" (les Communards), avec des dénonciations, des trahisons, comme l’ont écrit Louise, Lissagaray, Andrieu. C’est dans ces journées de juin que Pottier écrit son chant d’espoir. Après la Commune, il passe par la Belgique pour gagner la Grande-Bretagne, puis les Etats-Unis, après le déchirement du départ si bien décrit par Jules Vallès dans "L’insurgé".

 

   L’Internationale restera inconnue jusqu’en 1883. Présentée au concours de la Lice chansonnière, une célèbre goguette parisienne, elle permit de couronner un vieux monsieur (67 ans), usé par l’exil, les espoirs déçus, la maladie, la souffrance, revenu en France après la loi d’amnistie de 1880. A sa mort en 1887, le convoi qui mène au Père Lachaise, à sa tombe, près du mur des Fédérés, est conduit par Louise Michel, Vaillant, Charles Longuet ; sur le cercueil l’écharpe rouge à glands d’or de la Commune. Et pourtant, la chanson n’est guère connue. Elle n’a pas de mélodie et on la chante sur l’air de La Marseillaise - comme c’était souvent le cas à cette époque. Un chant d’unité ? Gustave Delory, futur maire de Lille, va repérer ce texte pour renouveler le répertoire de la Lyre des travailleurs. Il demande à un ouvrier, Pierre Degeyter d’en faire la mélodie. En 1888, elle est chantée pour la première fois... un triomphe ! On en imprime 6.000 exemplaires. En 1901, Jean-Baptiste Clément en rachète les droits. Passons sur la polémique relative aux droits pour la musique entre la mairie de Lille, le POF (Parti Ouvrier Français) de Guesde, les frères Degeyter... Le triomphe est en route. Il existera plusieurs versions de L’Internationale, celle des anarchistes, la viticole, celle des mères d’inspiration pacifiste, mais celle qui reste, c’est celle qu'on connaît. Wilheim Liebknecht l’introduit en Allemagne en 1896, elle est chantée en Russie en 1889, et la Seconde internationale en fait son chant officiel en 1892. Certes, on veut en faire un chant d’unité… Encore faut-il être uni. Chacun connaît les chapelles du mouvement ouvrier, les excommunications, les anathèmes, les encycliques, et autres confessions publiques… pour un mouvement laïc… Certains, proches de l’accession au pouvoir - comme le SPD, ou les possibilistes rançais -, se méfient d’un texte révolutionnaire qui peut faire peur à ce que l’on n’appelle pas encore les classes moyennes. On y oppose La Marseillaise. C’est Jean Jaurès, l’homme de la synthèse, qui souligne que les mots de l’une ne sont pas plus graves que ceux de l’autre. Il rappelle "le sang impur", les faits, la Guerre de Vendée, les propos de Saint-Just ou de Marat. L’appel à la désertion est fréquent dans les conflits, mais le déserteur se grandit quand il rejoint le camp de la liberté. Pour Jaurès, L’Internationale n’a été que la suite prolétarienne de La Marseillaise.

 

   L’Internationale ne permettra pas la grève générale, concept français développé par Georges Sorel. Jean Jaurès assassiné, rares sont les socialistes qui s’opposent à la guerre. Même des anarchistes comme Piotr Kropotkine ou Jean Grave s’impliquent en faveur des alliés. La vague guerrière emporte tout en raison de l'essor des nationalismes. L’apothéose de L’Internationale sera la révolution de 1917. Elle sera chantée pour la première fois au soviet de Petrograd en avril 17 ; en février, c’était La Marseillaise. En 1919, les marxistes-léninistes créent la IIIe internationale, le Komintern, avec les méthodes de Marx regroupant trente-cinq organisations plus ou moins fictives. L’Internationale, le chant, deviendrait-elle communiste ? En tout cas, elle est l’hymne officiel de l’URSS (créée en 1922) et les paroles se retrouvent apparemment concrétisées dans les actes du régime : le plan, la valeur du travail (Stakhanov), la terre aux paysans (pas longtemps), les usines aux ouvriers. Pourtant, plusieurs internationales vont coexister, notamment la Seconde qui se reconstitue, social-démocrate. Une fois de plus, L'Internationale sera le chant d’union en février 1934, en juin 1936, pendant la Guerre d’Espagne. Ce fut le chant des Brigades internationales. Elle perd son statut d’hymne officiel en URSS en 1943, car Staline adopte un chant plus national (en rapport avec la ligne du "socialisme dans un seul pays"). Elle prend une dimension nouvelle dans les années 1945-1960 dans les luttes anticoloniales. 146 ans après sa création, a-t-elle perdu de son actualité ? Et peut-elle encore faire écho dans notre société ?

 

   Un chant de lutte et d’appel à l’union... La référence à la Commune est clairement énoncée avec la dédicace au citoyen Gustave Lefrançais, membre de la Commune, un socialiste anarchiste, tout comme Pottier. Le refrain... Le refrain est donc un appel à la lutte qui doit mettre en place une vie meilleure pour tout le genre humain. C’est un appel à l’unité des travailleurs. Ceux qui ont connu la Commune ont tous mesuré et dénoncé les divisions au sein des assemblées, même lorsque les Versaillais pénètrent dans Paris. Il faut relire les pages de Lissagaray, "Histoire de la Commune de Paris de 1871", ou le livre de Jules Andrieu, "Notes pour servir à l’histoire de la Commune de Paris". Il faut noter que ce n’est pas un appel à la violence. Il y a comme une forme d’idéal... Le premier couplet... "Les damnés de la terre", voilà qui fait penser au livre de Frantz Fanon, un des fondateurs du courant de pensée tiers-mondiste. "Les forçats de la faim", la formule fait référence à la faim dans les quartiers populaires ; les échauffourées étaient nombreuses, les pillages de boulangerie aussi - Louise Michel sera arrêtée dans de telles circonstances. Un appel au regroupement (encore) et à la mobilisation de la foule esclave. "Le monde va changer de base" fait écho à l’une des thèses de Proudhon selon laquelle il faut passer du stade de la révolte qui détruit sans construire à celui de la révolution qui change une société du tout au tout ("Qu’est-ce que la propriété ?")... "Nous ne sommes rien, soyons tout" souligne la rupture entre les républicains qui ont tiré sur la foule des ouvriers en 1848, en 1871, et la classe ouvrière. Il fait écho à la formule de Siéyès sur le Tiers-Etat. C’est une référence à la Révolution de 1789 pour montrer que le travail n’est pas achevé.

 

   Le deuxième couplet... Il est probablement celui qui traduit l’esprit anarchiste. Les grands théoriciens de l’anarchisme auraient pu l’écrire "Ni dieu, ni César", la formule de Blanqui reprise par les anarchistes par la suite est bien "Ni dieu, ni maître". De même, "ni tribun", c’est-à-dire le refus d’un chef, d’une autorité, bien qu'il y ait de nombreux compagnons libertaires de renom qui ont construit l’idéal libertaire. "Producteurs, sauvons-nous nous même !"... N’est-ce pas la formule des statuts de l’AIT ?  à savoir "L'émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes"... ? Une démarche reprise dans l’anarcho-syndicalisme et les bourses du travail de Fernand Pelloutier, sans oublier la Charte d’Amiens de 1906. "Décrétons le salut commun", un nouvel appel à l’union et au travail en commun. "Pour que le voleur rende gorge", la formule est forte ; rappelons-nous le pamphlet de Proudhon, dont la phrase qui terrorisa les possédants : "Qu’est-ce que la propriété ? C’est le vol !"... "Pour tirer l’esprit du cachot", un clin d’œil aux Lumières et à la raison, à l’éducation populaire et aux écoles ouvrières. Et alors que le mouvement ouvrier est blessé profondément par la répression, Pottier lance un nouvel appel à la mobilisation. Le troisième couplet... "L’Etat opprime"... Il est l’instrument de la classe dominante, la bourgeoisie avec ses forces coercitives : l’armée, la police, les tribunaux, la violence légale de Weber (Bakounine, "Dieu et l’Etat"). La loi n’est pas juste, l’impôt non plus, les droits du pauvre sont bafoués, ce qui montre les limites de la "Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789". Une référence à celle de 1793... "Pas de devoirs sans droits" fait référence aux revendications de l’AIT dès 1868. Le terme les Egaux fait écho au "Manifeste des Egaux" de Gracchus Babeuf et de Sylvain Maréchal.

 

   Le quatrième couplet... "Les rois de la mine et du rail" sont évidemment les capitalistes de la Révolution industrielle ("Germinal"). Le couplet reprend le pamphlet de Proudhon. Le cinquième couplet... Ce couplet est nettement antimilitariste. Les travailleurs ne doivent pas se faire la guerre. Ce sera le grand débat de 1914. Je renvoie au livre de Guillaume Davranche, "Trop jeunes pour mourir", sur le mouvement ouvrier et le pacifisme (Libertalia, 2014). "Nos balles sont pour nos propres généraux" fait penser au général Gallifet, le massacreur de la Commune. Pensons aussi à l’utilisation de l’armée qui rentre dans Paris et tire sur la foule. Pensons à Fourmies. Le sixième couplet... "Ouvriers, paysans", c’est l’appel à l’unité du monde du travail, du monde de la production, la faucille et le marteau... La valorisation du travail, pas d’oisif. L’honneur du travail, l’honneur dans le travail, la protection et l’entretien des outils de travail pendant les grèves. Pour la formule "Les vautours", je ferai un clin d’œil à Monsieur Vautour. Ainsi appelait-on les propriétaires qui voulaient leur terme ou expulsaient les familles. Il y a un ressentiment de surexploitation dans le monde ouvrier. Mais, messianisme oblige : "Le soleil brillera toujours". Cette formule servira de base pour des affiches, des films, des poèmes, et d’autres chansons révolutionnaires.

 

   En guise de conclusion... Certes il fut bien court "Le temps des cerises" chanté par Jean-Baptiste Clément, mais il ne s'agissait absolument pas de céder au désespoir. Déjà la révolte grondait, et le même Jean-Baptiste Clément écrivait en 1898 : "Les mauvais jours finiront et gare à la revanche quand tous les pauvres s’y mettront."... Mais, "Groupons-nous, et demain, l’Internationale, sera le genre humain" (le refrain même de "L'Internationale"). J'ajoute deux points importants... D'abord, en rapport avec cet esprit d'unité de L'Internationale, l'unification du PSU SFIO en 1905 (Parti Socialiste Unifié Section Française de l'Internationale" (la Seconde), Jaurès acceptant, par esprit d'unité justement, d'intégrer les conceptions de "lutte des classes et de révolution" très orthodoxes de Jules Guesde, malgré ses réserves "réformistes-révolutionnaires"... (la "synthèse jaurésienne" : démocratie politique, économique, et sociale). Une unité qui ne dura en France que pendant 15 ans, puisqu'elle se fracassa sur le mur de l'éclatement de la Grande guerre en 1920, lors du Congrès de Tours...

 

 

 

 

Francis Pian

 

 

 

28 décembre 2018

 

 

 

 

 

ANNEXE : les paroles de L'Internationale

 

Couplet 1 :

 

Debout ! les damnés de la terre !

Debout ! les forçats de la faim !

La raison tonne en son cratère,

C’est l’éruption de la fin.

Du passé faisons table rase,

Foule esclave, debout ! debout !

Le monde va changer de base :

Nous ne sommes rien, soyons tout !

 

Refrain :

(2 fois sur deux airs différents)

 

C’est la lutte finale

Groupons-nous, et demain,

L’Internationale,

Sera le genre humain.

 

Couplet 2 :

 

Il n’est pas de sauveurs suprêmes,

Ni Dieu, ni César, ni tribun,

Producteurs sauvons-nous nous-mêmes !

Décrétons le salut commun !

Pour que le voleur rende gorge,

Pour tirer l’esprit du cachot,

Soufflons nous-mêmes notre

forge,

Battons le fer quand il est chaud !

 

Refrain

 

Couplet 3 :

 

L’État opprime et la loi triche,

L’impôt saigne le malheureux ;

Nul devoir ne s’impose au riche,

Le droit du pauvre est un mot

creux.

C’est assez languir en tutelle,

L’égalité veut d’autres lois :

"Pas de droits sans devoirs,

dit-elle,

Égaux, pas de devoirs sans droits !"

 

Refrain

 

Couplet 4 :

 

Hideux dans leur apothéose,

Les rois de la mine et du rail,

Ont-ils jamais fait autre chose,

Que dévaliser le travail ?

Dans les coffres-forts de la bande,

Ce qu’il a créé s’est fondu.

En décrétant qu’on le lui rende,

Le peuple ne veut que son dû.

 

Refrain

 

Couplet 5 :

 

Les Rois nous saoulaient de fumées,

Paix entre nous, guerre aux

tyrans !

Appliquons la grève aux armées,

Crosse en l’air et rompons les rangs !

S’ils s’obstinent, ces

cannibales,

A faire de nous des héros,

Ils sauront bientôt que nos balles

Sont pour nos propres généraux.

 

Refrain

 

Couplet 6 :

 

Ouvriers, Paysans, nous sommes

Le grand parti des travailleurs ;

La terre n’appartient qu’aux hommes,

L'oisif ira loger ailleurs.

Combien de nos chairs se repaissent !

Mais si les corbeaux, les vautours,

Un de ces matins disparaissent,

Le soleil brillera toujours !

 

Refrain

 



15/02/2019
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