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LEON BLUM LEADER SOCIALISTE ET HOMME D'ÉTAT

 

 

Catégorie : Histoire

 

 

 

 

 

Léon Blum et Roger Salengro - à sa droite (1)

 

 

 

   Léon Blum naquit le 9 avril 1872, à Paris, et mourut le 30 mars 1950, à Jouy-en-Josas (dans le département des Yvelines). Nous savons quel important homme politique il fut, leader du socialisme français, puis chef d'État de notre pays - en tant que président du Conseil. Figure du socialisme, Blum fut le grand dirigeant du PSU SFIO (Parti Socialiste Unifié Section Française de l'Internationale ouvrière : la IIe Internationale), et président du Conseil des ministres, c'est-à-dire précisément chef du gouvernement, à deux reprises, de 1936 à 1937, puis de mars à avril 1938, et eut des fonctions gouvernementales au début de la IVe République. Il marqua donc l'histoire politique française à plusieurs reprises. Dans cet article, je vais essayer de retracer les grandes périodes de sa carrière politique, d'abord en tant que leader socialiste, puis comme chef d'Etat - au niveau de la fonction dite de président du Conseil -, sans omettre de mentionner sa captivité dans le camp nazi de Buchenwald, en tant qu'homme de gauche et comme juif, à la suite du procès de Riom, que le régime de Vichy des Pétain/Laval tenta de lui faire subir ; un procès qui se retourna d'ailleurs lamentablement contre ses auteurs, car il s'agissait évidemment de faire, à travers sa personne, le procès de la politique qui avait été menée par le Front populaire...

 

   D'abord, et après son rôle actif pendant l'Affaire Dreyfus dans sa jeunesse (il lutta ardemment contre les antidreyfusards), nous savons qu'à partir du 25 décembre 1920 (et jusqu'au 30 décembre de la même année) eut lieu le Congrès de Tours, qui déchira le mouvement socialiste (au sens large du terme) en deux, et que Léon Blum y joua un grand rôle... En effet, le PSU SFIO, qui avait été créé (et unifié) en 1905, éclata. Malgré une motion "centrale", qui avait tenté d'empêcher la scission de la SFIO, le parti se sépara, avec d'un côté les socialistes maintenus (la SFIO, toujours dans le cadre de la IIe Internationale), et de l'autre la création d'un parti communiste, le PCF SFIC (le Parti Communiste Français, Section Française de l'Internationale Communiste : la IIIe Internationale, liée à Moscou, en rapport avec Octobre 1917). Des historiens considèrent la création du PCF comme étant le fait le plus important de ce "grand schisme" au sein du socialisme français (et international). Et pourtant, au regard de ce que l'Histoire nous a montré par la suite, d'autres historiens analysent le fait que ce fut le discours du leader de la SFIO maintenue, Léon Blum, qui apparaît comme fondamental... ? Je rappelle en effet que celui-ci ne parla pas que de "garder la vieille maison" (un socialisme réunifié dans l'avenir), pendant que "nos frères" iront "courir l'aventure"... En effet, dans une envolée quasi prophétique, Blum décrivit devant tous les mandatés présents le mécanisme qui allait mener au stalinisme, en partant de "comités occultes" qui ne pourraient qu'aboutir à "la dictature d'un homme", et non à celle du "prolétariat" (qu'il soutenait, en tant que "dictature impersonnelle et collective")... A la fin de ce congrès, les socialistes maintenus s'écrièrent : "Vive Jaurès !", tandis que les communistes, qui venaient de se structurer politiquement, lancèrent des : "Vive Jaurès ! Vive Lénine !"...

 

 

 

 

 

 

 

 

Rupture du Congrès de Tours : 25 décembre 1920

 

 

 

   Ensuite, le grand moment de la vie politique de Léon Blum correspondit à l'époque du Front populaire, lorsqu'il devint président du Conseil de l'union des gauches en 1936 - alors que tout le monde s'attendait à ce que les radicaux fassent le meilleur pourcentage de voix et assureraient ainsi cette fonction à peu près équivalente à celle d'un Premier Ministre actuel (mais avec de grosses différences). Blum voulait intervenir militairement en faveur des Républicains espagnols contre Franco, qui était soutenu par les fascistes italiens et les nazis, utilisant des armes (notamment l'aviation) comme éléments d'entraînement pour la guerre qu'ils préparaient contre les démocraties occidentales. Léon Blum n'arriva pas à le faire en raison de deux faits politiques majeurs. D'abord, à cause des radicaux qui annoncèrent qu'ils feraient tomber le gouvernement de Front populaire s'il y avait la moindre tentative d'intervention directe dans le cadre de la guerre civile espagnole entre Républicains et Franquistes (par peur d'une contagion). Ceci entraîna le retrait du soutien des communistes au Front populaire (qui était composé à la base du Parti Communiste, qui soutenait sans participer, et de la SFIO, des radicaux et de divers gauche, qui participaient au gouvernement). Ensuite, à cause de la Grande-Bretagne, qui voyait en Franco bien davantage une sorte de monarchiste juste un peu autoritaire que comme un politique fascisant... Toutefois, par la suite, Blum livra des armes aux Républicains espagnols, dans le cadre de ce que l'on appela "la non-intervention relâchée". En juin 1937, Léon Blum démissionna une première fois du poste de président du Conseil. Il retrouva ses fonctions - brièvement - du 13 mars au 10 avril 1938. Ses réformes, prises dans le contexte du mouvement de grèves (pression sur le patronat), qui aboutirent aux accord Matignon - nuit du 7 au 8 juin 1936 - permirent une amélioration de la condition des travailleurs : augmentation des salaires, deux semaines de congés payés, réduction du temps de travail à 40 heures par semaine, conventions collectives dans les entreprise, etc. Le Front populaire fit aussi participer plusieurs femmes à ses gouvernements - même si celles-ci n'avaient pas encore le droit de vote ; il fallut attendre l'année 1944-1945 pour ce faire... Il faut aussi dire qu'on ne s'imagine pas - malgré le retour actuel des propos et des actes antisémites - le niveau d'opposition que rencontra le Front populaire, à travers la haine qui toucha la personne même de Blum, en tant que français juif (2) (3)...

 

 

 

 

 

 

 

 

"Grèves de la joie" : mai-juin 1936

 

 

 

   Enfin, pour ce qui concerne la dernière partie de sa vie politique, Léon Blum - lors de l'occupation de la France par les armées du Troisième Reich - fut emprisonné par le régime de Vichy des Pétain/Laval, traduit en justice lors d'une parodie de procès (à Riom), un procès que Blum avait réussit à retourner contre ses auteurs vichystes... Il fut ensuite déporté à Buchenwald, où les nazis voulaient le garder en otage au cas où il puisse servir à "quelque chose"... comme "monnaie d'échange"... Président du GPRF (Gouvernement Provisoire de la République Française) à la Libération, de décembre 1946 à janvier 1947, son cabinet fut chargé de mettre sur les rails les institutions de la IVe République. Pour finir mon article, je voudrais ajouter un élément trop peu connu. Le leader socialiste Léon Blum avait écrit - en captivité, durant l'année 1944 - un livre important intitulé "A l'échelle humaine", qui aurait très bien pu ne pas paraître ultérieurement, en 1945, puisqu'il sortit en cachette de la prison (où Blum était tenu enfermé par les nazis), et dans lequel il donnait au moins indirectement des "pistes" pour une France plus démocratique et sociale au niveau de ce que pourrait être "l'après-guerre"... On sait aussi que l'ancien chef de la SFIO et du Front populaire y fit le bilan de son action politique, ainsi que des "erreurs" qu'il avait pu commettre... Mais, ce que l'on ignore très souvent, c'est l'analyse qu'il donna - déjà - à propos d'une certaine dégénérescence de la presse d'opinion vers la fin de la IIIe République, avec, de surcroît, un essor de plus en plus net de ce que nous appelons maintenant "la presse people", même si celle-ci existait en réalité depuis longtemps et avait toujours correspondu aux goûts d'un certain lectorat... Encore un point : Léon Blum aurait souhaité que la SFIO s'ouvrit aux catholiques de gauche qui s'étaient battus, en tant que Résistants, contre le nazisme, pendant l'Occupation ; mais, ce projet ne put aboutir en raison des pesanteurs laïcistes (hostiles à une laïcité ouverte) qui continuaient de dominer la "vieille maison" du socialisme qu'était la SFIO... Il fallut attendre les années 1970-1975 pour que ce projet d'union puisse se réaliser, notamment en rapport avec l'arrivée de militants de la CFDT (4) et rocardiens au sein du nouveau PS - à la suite du congrès d'Epinay (en 1971) - placé sous la direction de François Mitterrand...

 

 

(1)- Le socialiste Roger Salengro, d'abord député du Nord et maire de Lille, puis qui fut le premier ministre de l'Intérieur du Front populaire, devint l'objet d'une odieuse campagne de presse de la part de la droite et de l'extrême droite, qui l'accusèrent de lâcheté et de désertion pendant la Guerre de 14-18. Miné par ces terribles calomnies, qui touchèrent jusqu'à sa famille, il se suicida le 18 novembre 1936

 

(2)- Léon Blum faillit être tué par des militants royalistes de l'Action Française (des Camelots du roi), qui l'avait reconnu à Paris alors qu'il était dans une voiture. Lors des obsèques de Jacques Bainville, le 13 février 1936 (quelques mois avant la victoire du Front populaire), Léon Blum croisa fortuitement un cortège de jeunes militants de l'Action française - ces derniers se ruant sur le véhicule et lynchant le futur président du Conseil. Seule l'intervention d'ouvriers, qui se trouvaient dans le quartier, lui permirent d'échapper probablement à la mort, les Camelots du roi s'enfuyant alors à toutes jambes

 

(3)- Xavier Vallat, un extrémiste de droite, et figure emblématique de l'antisémitisme français, lança, du haut de la tribune du parlement, et en s'adressant à Léon Blum, après sa nomination en tant que président du Conseil : "Pour la première fois ce vieux pays gallo-romain va être dirigé par un Juif "

 

(4)- La CFDT (ou Confédération Française Démocratique du Travail), qui existe bien sûr toujours, fut à l'origine une centrale syndicale issue d'une scission au sein de la CFTC (Confédération Française des Travailleurs Chrétiens), une rupture qui se produisit dès 1964, sur une base de déconfessionnalisation par rapport au catholicisme et d'une orientation politique à gauche 

 

 

 

Eléments bibliographiques :

 

 

"Léon Blum" - Jean Lacouture, Seuil, réédition de 1979, 640 pages

 

 

Une présentation de ce livre :

 

 

"Comment Blum devint-il l'homme le plus insulté / et même vraiment haï / de France ? En défendant Dreyfus, en unifiant le parti socialiste, en prenant la tête du Front Populaire, en soutenant la Résistance, il récolta l'injure des antisémites, la haine de la droite conservatrice, l'opprobre des communistes, les brutalités de l'Action française, le procès de Riom, la déportation. Blum administra à tous la preuve de sa fermeté morale, de son courage, de son sens de la liberté et de la justice. Cette biographie, nourrie de documents et de témoignages, n'est pas une hagiographie laïque. La sympathie de Jean Lacouture pour Léon Blum va de pair avec cette vigilance critique qui a fait de lui le biographe incomparable de Malraux, de Gaulle, Hô Chi Minh, etc.".

 

 

"Le Front populaire" - Jean Vigreux, PUF, "Que sais-je ?", 2011, 128 pages

 

 

Une présentation de ce livre :

 

 

"Le Front populaire fait partie des moments fondateurs de l'histoire contemporaine de la France. Événement mythique, inscrit au Panthéon des gauches, le Front populaire est une étape historique qui participe aux changements de la société française ; ayant suscité des espoirs, mais aussi des peurs et certains désenchantements, ses traces restent profondes au sein de la culture nationale. Toutefois, au-delà des légendes, il demeure important de comprendre les enjeux de l'époque, les tensions à l'oeuvre au cours de la période 1934-1938. L'enchaînement des manifestations, l'émergence de nouvelles pratiques politiques et culturelles permettent de mieux saisir l'expérience du Front populaire. Ces dimensions multiples invitent également à penser l'événement dans un jeu d'échelles, où les logiques internationales rencontrent les logiques nationales, voire locales... Le Front populaire s'inscrit alors dans différents territoires tout en cumulant trois dynamiques : un mouvement social, une séquence politique et un foisonnement culturel sans précédent. De l'antifascisme à la lutte contre la crise économique et sociale, il propose une alternative aux politiques menées depuis la fin des années 1920, pour défendre et renforcer la République. Grâce à l'ouverture d'archives nouvelles en particulier celles de Moscou, ou encore celles des banques suisses on peut revisiter cette période fondatrice, tout en l'inscrivant dans une séquence historique plus longue, puisqu'elle reste une matrice de la Résistance, du CNR / ou Conseil National de la Résistance /, et de la Libération".

 

 

Jean-Luc Lamouché

 

9 avril 2019

 



09/04/2019
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